samedi 10 mars 2007

Droombeek

Le projet Droombeek est un projet hollandais de cartographie informative, réalisé et mis en service en mai 2006, dont la vie se poursuit en 2007.
Le contexte et la naissance de ce projet sont essentiels pour en comprendre les enjeux. Droombeek a pour but d’enregistrer et de rendre accessible la mémoire de Roombeek, quartier résidentiel de la ville de Enschede au Pays-Bas, construit en partie sur une ancienne zone industrielle détruite en 2000 par une explosion de l’une des usines. Ce site est particulier, car le désastre est récent et la reconstruction d’une partie du site reconvertie en lotissement d’habitation a été très rapide.
L’artificialité de cette ville nouvelle pose la question de l’histoire et de l’âme du lieu. Chaque lieu possède sa propre mémoire. L’association Droombeek Foundation est en charge de restituer la mémoire de ce quartier à l’histoire singulière.
Plutôt que d’opter pour l’édification d’un mémorial (figé, statique), l’association Droombeek Foundation a choisi de proposer un projet numérique, alimenté par les expériences propres de chacun, des anciens « habitants » du lieu, des habitants actuels et des visiteurs. A l’aide de l’interface numérique les contributeurs ajoutent leurs histoires, photos, anecdotes sur le site web. La mémoire du lieu est créée de manière collective. La publication s’effectue à la fois depuis le lieu, grâce à l’envoi de messages SMS et MMS géolocalisés, et aussi directement, sur le site web. Les messages déposés forment des parcours de visite et de découverte du lieu. Les traces semées dans le quartier sont accessibles et consultables sur le site Internet, depuis le domicile, mais surtout en situation de mobilité, lors de la visite ou du déplacement dans Roombeek.



L’enjeu du projet est de transformer cet espace neuf en un espace habité, grâce à l’échange d’histoires sur le passé de ce quartier, en reliant ces méta informations à l’endroit précis physique. Le pont effectué entre le lieu tel qu’il est aujourd’hui et ce qu’il a été dans le passé, est ainsi dynamique, vivant et enrichi très régulièrement. Surtout il traduit une réalité des faits et du vécu, sans cesse réactualisée. « En liant le passé au présent de cette manière, le site est devenu un espace vivant et vécu. » (hybrid space)
Internet et les outils du numérique permettent une généralisation et un impact important du projet au delà de l’échelle locale. La force de ce projet est qu’il ne requiert pas d’apprentissage spécifique de la part des intervenants et contributeurs. Les médias utilisés sont déjà connus au quotidien : l’Internet et l’envoi / consultation de fichiers depuis le téléphone portable. De plus, le numérique permet de faire vivre un projet impactant avec un coût minimisé.
L’une des conséquences immédiates est que les histoires privées de chacun deviennent des éléments de construction et des repères publics, plus globaux, et participent à la politique de l’espace. L’expérience donne plus d’authenticité à l’histoire du lieu, relatée par les habitants, les élèves de l’école, les visiteurs de passage et non pas un guide touristique, ou un historien.
Le projet Droombeek présente ainsi un aspect pédagogique, en proposant l’apprentissage et la transmission de connaissances et d’un savoir vivant autour d’un contexte précis. Cela peut rappeler, par exemple, les témoignages de personnes encore vivantes qui ont vécu l’horreur des camps de concentration nazis et qui sillonnent les pays pour se rendre dans les écoles afin de raconter ce qu’elles ont vécu. C’est un moyen de garder une trace de ce type d’intervention au delà d’un instant T et d’un lieu particulier.
Droombeek est un projet en pleine expansion. L’interface d’édition et de consultation évolue en permanence et le nombre de témoignages publiés grandit chaque semaine. C’est un projet encore jeune et expérimental, qui se construit et évolue grâce aux évolutions technologiques de la géolocalisation qui s’améliorent régulièrement, et au déploiement du réseau Internet urbain haut débit sans fil, ainsi que par l’appropriation grandissante des outils mis à disposition.
Le quartier Roombeek construit les histoires et les histoires construisent Droombeek, mémoire participative du lieu et promenade numérique dans les rues du quartier.



Le projet peut s’étendre et servir d’exemple, de référence, à d’autres lieux qui utiliseraient ces tags virtuels urbains pour annoter, commenter leur morceau de ville, afin qu’il ne tombe jamais dans l’oubli, à condition de s’intégrer parfaitement, ingénieusement aux structures et aux outils de géo-publications existants.

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